Shadowrun, le meilleur univers de jeu de rôle sur table ! 

Voilà un titre bien péremptoire ! J’avoue ne pas avoir pu résister à la tentation de provoquer quelque peu par le choix du titre.

Ce choix des mots ne doit toutefois pas cacher un fait indéniable : l’univers de Shadowrun est incontestablement un des plus riches jamais créés.

Shadowrun, qu’est-ce que c’est?

Shadowrun, c’est un jeu de rôle sur table

Shadowrun est un jeu de rôle sur table prenant place dans un univers Cyberpunk un peu particulier, dont la première édition a été créée en 1989. A l’époque, le jeu prenait place principalement à Seattle en 2050, dans les UCAS (United Canadians and Americans States).

Cet univers de jeu de rôle a suscité un fort engouement dans la communauté des rôlistes : dans un univers uchronique, le développement des nouvelles technologies se conjugue avec un événement dramatique qui a eu lieu en 2012 : l’Eveil, c’est-à-dire le retour de la magie. De là, certains enfants ont vu certains gènes se « réveiller », devenant des nains, des elfes puis, quelques années plus tard, des orques ou des trolls.

Shadowrun, Fifth Edition GM Screen - Dante's Inferno
L’écran de jeu de Shadowrun 5ème édition, que vous pouvez acheter sur le site de Black Book Editions !

Un tel synopsis pourrait faire lever le sourcil : et pourtant ça fonctionne !

Pourquoi?

Hé bien parce que les concepteurs du jeu ont réussi à développer un univers extrêmement riche et cohérent, parfaitement crédible. Ainsi, outre les races (et les problèmes raciaux qui en découlent), vous avez une véritable histoire parallèle ayant abouti à redessiner les frontières. Les épidémies, l’Eveil, l’apparition des mégacorporations (des entreprises si énormes qu’elles bénéficient de l’extraterritorialité, c’est-à-dire qu’elles ne répondent plus aux lois des Etats mais à leurs lois propres), les évolutions technologiques, la Matrice (le rejeton fort évolué d’Internet et de la réalité augmentée/virtuelle), tout cela réussit à se conjuguer pour former ce bel ensemble si attachant.

Dans ce jeu, vous incarnez ce qu’on appelle des « shadowrunners » : des mercenaires des ombres, des « actifs sacrifiables » permettant de faire de « sales coups » en pouvant nier toute implication avec vous. Vos clients peuvent être extrêmement variés : pour vous en convaincre, vous n’avez qu’à jeter un bref coup d’oeil au shadowiki, où vous ne pourrez que constater l’énorme nombre d’organisations. Des « associations caritatives », des corporations extrêmement nombreuses (les mégacorporations n’étant qu’au nombre de 10, d’Arès ou Aztechnology à Wuxing, en passant par Saeder-Krupp), des gouvernements, de riches individus…les clients ne manquent pas, les dangers non plus.

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Des missions d’enlèvement, de meurtre, de protection, des vols, des enquêtes, des course-poursuites effrénées : tout cela est envisageable au cours d’une partie, et plus encore.

Ce jeu paraît donc parfait, n’est-ce pas?

Hé bien, malheureusement, il ne l’est pas. En effet, les règles du jeu sont riches, très riches, permettant de simuler quasiment toutes les situations… mais cela a un prix : un Maître du Jeu (celui qui conduit « l’histoire » au cours d’une partie de jeu de rôle) doit ingurgiter un très grand nombre de règles et d’informations, et doit être particulièrement chevronné pour réussir à surmonter certains imprévus (les joueurs étant ce qu’ils sont, un scénario bien calibré peut parfaitement dérailler !). De même, pour le joueur, la création de son personnage lui offre une immense liberté… à tel point qu’il peut se sentir perdu, d’autant plus que le processus de création est très long.

Cette complexité peut paraître intimidante, voire rédhibitoire pour tout débutant.

Pour celles et ceux qui ont déjà pu essayer ce jeu de rôle, et qui peuvent se sentir perdus devant ce broussaille de règles, je vous recommande la chaîne Youtube de Complex Action, un youtubeur très didactique qui vous explique dans chaque vidéo (plutôt courte) telle ou telle règle du jeu.

Shadowrun, ce sont des jeux vidéos

Je recommande, comme première approche de cet univers profond et détaillé, de vous pencher sur les jeux vidéos tirés de cet univers.

Il convient d’en citer trois :

Ces trois jeux ont été conçus par Harebrained Scheme.

Le premier, Shadowrun Returns, me paraît (à titre personnel) un peu superficiel et simplet au niveau du scénario. Il peut servir de première approche de cet univers, mais il ne saurait (à mon sens) suffire à comprendre ni saisir pourquoi ledit univers est considéré comme particulièrement complet. Ce jeu permet un rapide survol, pas toujours adroit d’ailleurs, de ce qu’est Shadowrun. Ce jeu se place à Seattle en 2050 ; vous jouerez un shadowrunner désargenté recevant un étrange message d’une ancienne connaissance vous donnant pour mission… d’élucider les causes de sa mort.

Le deuxième jeu, Shadowrun Dragonfall, est d’une qualité incomparablement supérieure au précédent, que ce soit au niveau de l’immersion dans l’univers de shadowrun ou du scénario. Ici, vous jouerez un shadowrunner allemand s’installant non loin de Berlin (une cité anarchiste) dans les années 2050 sur l’invitation d’une connaissance : Monika Schäfer, une hackeuse de grand talent. Avec son équipe, à savoir Dietrich (un ancien rocker punk devenu shaman à plein temps), Glory (une guerrière lourdement augmentée) et Eiger (une troll ex-membre des forces spéciales allemandes du KSK), vous essaierez d’accomplir une mission « simple » dans un manoir a priori peu surveillé. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner?

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Le dernier jeu, Shadowrun Hong Kong, est de plutôt bonne facture. Je ne vous cache pas qu’à titre personnel, je l’ai un peu moins préféré au deuxième volet ; ceci dit, il n’est pas sans qualité. Un peu plus dépaysant, il vous permettra de vous aventurer dans la ville de Hong Kong, une ville indépendante dirigée par un conseil corporatiste (les plus riches mégacorporations y siègent et décident de la politique de la ville). Nous n’évoluons donc plus dans le cadre de la ville anarchiste de Berlin mais dans une ville a priori plutôt hostile aux électrons libres. Mais il ne faut pas se fier aux apparences : les puissances locales ont besoin des services particuliers que seuls les shadowrunners peuvent leur apporter ; c’est là que, bon gré mal gré, vous intervenez.

Quand vous aurez fini ces trois jeux, ce qui vous demandera environ une vingtaine d’heures pour chaque, vous pourrez (je crois) commencer à saisir ce que j’évoque dans le présent article quand je parle avec enthousiasme de l’univers de Shadowrun. Je ne tiens pas à entrer dans les détails dans cet article : non seulement il est difficile de savoir par où commencer, mais il est peut-être encore plus difficile de savoir où s’arrêter. La meilleure approche me paraît donc de vous laisser vous faire votre propre opinion au fil de ces trois jeux.

Shadowrun, un… film avec Will Smith?

Pas tout à fait. Bright est un film produit par Netflix. Il s’agit, à cette heure, de la plus grosse production de Netflix, avec un coût estimé à 90 millions d’euros. Le synopsis est le suivant :

« Dans un univers parallèle où la magie fait partie du quotidien, deux flics de L.A. – un humain (Will Smith) et un orc (Joel Edgerton) – partent en quête d’une puissante baguette magique.« 

Bon, ça a l’air un peu simplet. Le réalisateur semble être le même que pour Suicide Squad -et j’ose croire qu’il aura appris de ses erreurs-.

Ce film semble fortement inspiré par Shadowrun mais ne semble pas s’insérer dans l’univers de Shadowrun. Outre un univers différent, je tiens à relever une autre différence : la composante Cyberpunk semble absente de ce film, qui paraît être de la « simple » fantasy contemporaine.

Je reste donc prudent : la hype est l’ennemi de la raison. Verdict le 22 décembre prochain. S’il s’agit d’une purge, attendez-vous à me voir nier le moindre lien entre Bright et Shadowrun.

 

14 réflexions sur “Shadowrun, le meilleur univers de jeu de rôle sur table ! 

  1. Ping : Du nouveau sur Cyberpunk 2077 – Journal d'un Curieux

  2. Arf! Les règles furent ingurgitées à la sortie de la seconde édition, puis régurgitées. Mes joueurs de l’époque lui préférèrent Rift, aux règles plus simples et à l’univers tout autant n’importe-nawak!
    Pour ma part actuellement, après trente ans de pratique, je reste sur l’idée que le setting de Spelljammer pour ADD est le meilleur (voir mon blog : https://derynnaythas.wordpress.com/) pour ce qui est du fun, et Néphilim le meilleur jeu, de cette galaxie en tout cas 🙂
    Si tu as l’occasion, essaie Eclipse phase, un jeu de sf/ horreur transhumaniste, aux thématiques profondes.

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    1. Oui, difficile de parler de Shadowrun (dont l’univers est, très clairement, celui que je préfère parmi les JdR que je connais) sans évoquer les règles…

      Spelljammer, cela fait une dizaine d’années que je n’y ai pas touché ! J’en ai gardé un bon souvenir. J’adore tout ce qui est relatif à Planescape, aussi.

      Quant à Néphilim, je me suis borné à la lecture du livre de base ; je n’ai pas été convaincu…mais je garde mon jugement : peut-être y a-t-il une profondeur que je ne soupçonne pas? Une façon de jouer particulière, une ambiance qui permet de passer un excellent moment? A voir.

      Je note pour Eclipse Phase, que je ne connaissais pas ! Merci du conseil !

      Ma prochaine « critique » (si je puis dire) concernera Numénéra,

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      1. Pour Nephilim, je me suis arrêté à la seconde édition, les suivantes ouvrant le jeu au plus grand nombre, ce que normalement j’approuve, mais là en l’occurrence, Nephilim se joue avec des amoureux et amoureuses de l’Histoire, des religions et du mysticisme, un public restreint donc, pour vivre de belles expériences à travers le temps, et une part réduite de démonstrations de pouvoirs.

        Numénéra, voilà un très bon jeu récent!

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  9. Le retour sur le devant de la scène de cet univers avec « Shadowrun Anarchy » (récemment financé sur GameonTabletop) relance complètement cet article, bonne introduction à l’univers.
    Je suis d’accord sur le fait que cet univers mêlant cyberpunk et fantasy, à la croisée des romans de Gibson, du film Blade Runner et de la fantasy à la Tolkien donne le vertige.
    On peut assurément y mener des aventures mémorables. Je vais d’ailleurs m’y essayer prochainement avec de nouveaux joueurs…
    J’adorerais avoir le temps de jouer aux jeux vidéos consacrés, mais cela me semble impossible à ce jour. Par contre, j’ai vu Bright et je n’ai pas vraiment été convaincu par le résultat.
    Le seul intérêt de l’opus Netflix pourrait être dans les rapports exposés à l’écran entre les espèces qui composent l’univers, entre méfiance, guerres de clans, absence de partage et racisme ordinaire. C’est quelque chose qui peut prendre du sens dans les parties de JDR sur table.

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  10. Ping : Dungeons & Dragons 5 : le jeu de rôle le plus connu, de retour en force ! – Journal d'un Curieux

  11. Lame

    Je parlerai de Shadowrun, le JDR sur table, n’ayant aucune connaissance des jeux vidéos dérivés.

    Je ne suis pas spécialement fan de Shadowrun et j’ai découvert le jeu avec la 2e édition qui m’a rebuté avec ses illustrations laides et infantiles. Ma préférence allait vers Cyberpunk 2020. Seulement voilà, il y a Shadowrun et Shadowrun. Ce qui est vrai pour une édition, la 2e en l’occurence, n’est pas forcément vrai pour les autres; je pense plus particulièrement à la 4e.

    Mon point de vue sur Shadowrun est qu’il l’un des derniers jeux communautaires (ceux qui génèrent de grande communauté de fan) avec l’Appel de Cthulhu et D&D. C’est à mon sens le plus résilient des JDR de cette catégorie. L’explication ne réside pas spécialement dans son univers mais plutôt dans la bonne gestion de la diversité et son caractère « Prêt à jouer ».

    Shadowrun gère bien la diversité parce qu’il offre une foule de concept aux joueurs sans virer à l’usine à gaz ou au casse-tête. Si les joueurs veulent former un groupe composé d’un magicien elfe, d’un panzerborg troll et d’un pilote fou ork, aucun problème: il est facile d’expliquer l’existence du groupe, ses sources de revenus, ses motivations, etc… Avec Dragonstar (que j’adore) ou Torg, c’est moins évident. Bien sûr, on a pas de vaisseaux: Eh alors? Beaucoup s’accommode bien d’un univers qui ne dépasse pas le niveau « continental opera ».

    Il y a aussi le côté « Prêt à jouer ». L’univers peut être compris et présenté rapidement, contrairement à ceux d’Eclipse phase et Mindjammer. Il n’en est pas moins riches pour autant: il y a plein de ressorts scénaristiques facilement exploitables complété par une large gamme de scénarios tout faits disponible dans le commerce. La complexité des règles n’est pas aussi évidente que cela comparé au Livre des Cinq anneaux, à AD&D, à Polaris, à D&D 3.5. , à Starfinder, etc… Le système de jeu – moderne – n’est pas remplis d’incohérence comme les différentes mouture du D6 système ou affublé d’un système de création de personnage bugué.

    L’univers se réinvente constamment, notamment au plan technologique mais toujours avec l’idée de fournir un univers de jeu, pas une fresque idéologique. Dans Shadowrun, la malveillance des corporations est bien mise en exergue mais on ne vous servira pas des modèles post-capitalistes pas clairs, rarement attrayants, en se persuadant éventuellement de faire du « JDR adulte ». Ah, oui, il y a tout ce qu’on veut en matière de transindividualisme mais pas de minduploading, d’hypersurveillance ou d’économie automatisé. On garde le ludique, on esquive les casse-tête.

    Je ne suis pas fan de Shadowrun mais je respecte ce jeu et j’espère avoir mis en évidence le fait que son succès ne repose pas sur le fait qu’il est le principal jdr intégrant des éléments médfan dans un univers cyberpunk.

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  12. Ping : Câblé, de Walter Jon Williams : cyberpunk, contrebande et Résistance. – Journal d'un Curieux

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