Bonjour à tous !
Aujourd’hui, je m’inscris dans la continuité en vous proposant -encore !- un article sur le worldbuilding. On reste sur quelque chose de technique, mais promis, une fois le volet « cosmologique » fermé, je pourrais passer à des considérations moins mathématiques et plus historiques, mythologiques et sociologiques.
Je tiens, toutefois, à clore ce chapitre de la cosmologie. Cela n’intéressera que bien peu de personnes, j’en ai conscience, mais cela permet de rendre disponible, en français, des outils et méthodes de worldbuilding pour celles et ceux qui sont amenés, quelqu’en soit la raison, à se poser la question de créer un monde imaginaire -et où les orbites, dans le cas présent, joueront un rôle important-.
Une orbite, c’est quoi?
Avant d’aller dans le dur du sujet, je tiens à rappeler ce qu’est une orbite.
Une orbite, c’est une trajectoire courbe d’un astre autour d’un point dans l’espace (un soleil, une lune, un barycentre).
Cette courbe sera plus ou moins excentrique, c’est-à-dire plus ou moins éloignée du centre. Très concrètement, cela signifie que l’orbite peut être circulaire (avec une excentricité de zéro : tous les points du cercle sont à distance égale du centre) ou plus ou moins ovale.
Calculer une orbite, à quoi ça sert?
Calculer une orbite a plusieurs applications pratiques en terme de worldbuilding. De nombreuses, en réalité.
Je vais vous en fournir quelques exemples, pour que vous réalisiez l’importance de cette donnée -qui semble purement technique, et infiniment secondaire lorsqu’on veut créer un univers imaginaire- sur votre monde.
L’orbite en elle-même va influer sur la période de révolution -c’est-à-dire la durée de l’année !-, la luminosité reçue (et donc, les températures), ou encore la taille du soleil dans le ciel.
L’excentricité de l’orbite a aussi une importance considérable. Nous ne nous en rendons pas compte car la Terre a une orbite (quasi) circulaire, mais en réalité, une orbite excentrique va avoir une grosse influence sur le climat, et ce sur l’ensemble de la planète ! Mars, par exemple, a une excentricité orbitale beaucoup plus importante que la Terre (0,093 contre 0,016). Cela semble une différence faible, mais ne nous y trompons pas : l’aphélie (le point de l’orbite le plus éloigné du soleil) de la Terre est à 152 millions de kilomètres ; son périhélie (le point de l’orbite le plus proche du soleil) est à 147 millions de kilomètres. Pour Mars, ces valeurs sont respectivement de 249 millions de kilomètres, et 206 millions de kilomètres. Plus de 40 millions de kilomètres de différence, cela a une influence sur l’énergie solaire reçue, qui va beaucoup plus varier (entre 492 et 715 W/m², ce qui fait une belle variation).
Comment calculer la période de révolution?
Je suis désormais contraint de vous parler de Johannes Kepler.
Ce dernier a observé, notamment, que la durée pour réaliser une orbite complète est proportionnelle à la distance entre la planète et son soleil.
En version simplifiée, cela donne :
p² = a³
p, c’est la période de révolution (en années terrestres).
a, c’est le grand-axe de l’orbite (en unités astronomiques), c’est-à-dire la distance entre le centre de l’orbite et le point le plus éloigné de l’orbite (le plus grand axe, quoi).
Par exemple, pour Venus :
p² = 0,723³
p = √0,723³
p = √0,3779
p = 0,6147
Autrement dit, une année sur Venus, d’après ce calcul, est égale à 0,6147 années terrestres. Ce n’est pas exact : une année vénusienne, en vrai, c’est 0,6152 années terrestres. Mais on reste très proche -notre but, c’est d’avoir quelque chose de globalement crédible, pas d’envoyer une sonde spatiale, pour notre objectif une légère imprécision ne fera pas de mal-.
Avec cette petite équation, vous pourrez déduire la période de révolution d’une planète en fixant la distance entre le soleil et votre planète. Attention, cette équation ne fonctionne que si la masse du Soleil est égale à 1 par rapport à notre soleil !
La version complexe du calcul prend en compte la masse du soleil et la masse du corps dont on calcule la période de révolution. Cette version est utile pour tous les cas où votre étoile a une masse solaire différente de celle de notre soleil.
p²=a³/(Mp + Ms)
Où Mp est la masse de votre planète, et Ms est la masse de l’étoile, les deux étant exprimés en unités solaires (c’est-à-dire que notre soleil a une Ms de 1 ; Jupiter a une Mp égale à 0,0009546 unité solaire).
Cette équation, plus précise, n’est utile que lorsque vous avez affaire à une étoile de faible masse (et où, de ce fait, la masse d’une planète peut avoir une influence significative : le ratio masse de la planète/masse de l’étoile sera plus étroit). Si vous n’avez pas un ratio étroit, vous pouvez légitimement retirer Mp de l’équation.
Un exemple concret :
Prenez une toute petite étoile, équivalente à 100 Jupiter, et une très grosse géante gazeuse, qui fait 10 Jupiter. Plaçons la planète sur une orbite similaire à celle de Mercure (0,387 UA).
Avec l’équation classique :
p² = 0,387³
p = √0,387³
p = √0,058
p = 0,241 année terrestre pour achever une révolution complète.
Avec la version longue :
Sachant que Jupiter = 0,0009546 la masse du Soleil, on obtient pour notre étoile hypothétique une Ms = 0,0009546*100 = 0,09546. Pour la géante gazeuse, Mp = 0,0009546*10 = 0,009546
p²=a³/(Mp + Ms)
P²=0,387³/(0,09546+0,009546)
P²=0,058/0.105006
p²=0,552
p=√0,552
p=0,742 année terrestre pour achever une révolution complète.
Cela fait une grosse différence !
Comment calculer la distance en fonction de l’intensité solaire voulue?
Pour être sûr que la planète que vous voulez créer est dans la zone habitable, telle que définie dans mon précédent article sur la création d’un système solaire, il vous faut veiller à ce que l’intensité solaire soit comprise entre 0,53 et 1,1.
La formule, c’est :
Pdist = √(SlumBolo / Intensité solaire)
Où Pdist = la distance entre la planète et son étoile (en UA)
SlumBolo = luminosité bolométrique
Intensité solaire = l’intensité solaire…par rapport à la Terre et notre Soleil (qui a une intensité solaire de 1, donc).
Comment déterminer la taille du soleil dans le ciel?
La taille apparente du soleil dans le ciel de votre planète peut être déterminée avec toutes les données que vous avez à votre disposition.
Pour cela, il vous faut appliquer l’équation suivante :
TAs = 57,3* (diamètre de votre Soleil / Pdist (en km)).
TAs, c’est la taille apparente du Soleil dans votre ciel, en degrés. Pour information, la taille apparente du Soleil sur Terre, c’est 0,5°.
Pour calculer la distance entre la planète et son étoile en kilomètres, il faut prendre Pdist et multiplier par le nombre de kilomètres dans une année astronomique (1 UA ≈149 millions de kilomètres).
Un exemple pour voir comment ça fonctionne
Prenons un exemple avec une étoile de type spectral M (une naine rouge, quoi), mettons un type spectral M2. D’après le tableau que vous trouverez dans mon article sur la création d’étoiles, la luminosité bolométrique d’une étoile de type M2 est de 0,04122571. Supposons que je veuille une intensité solaire identique à celle de la Terre.
Donc
Pdist = √(0,04122571 / 1)
Pdist = 0,203 unité astronomique.
A titre de comparaison, l’orbite de Mercure, c’est environ 0,307 unité astronomique au point le plus rapproché du Soleil.
Si je prends une planète ayant la taille de la Terre, dont la masse sera négligeable par rapport à l’étoile, nous aurons une année égale à :
p²=a³/Ms
P²=0,203³/0,42
p²=0,00836/0,42
p²=0,0199
p=√0,0199
p=0,141
Soit une année d’environ 51,465 jours terrestres.
Et la taille apparente du Soleil dans le ciel de ma planète à l’année fort courte?
Rien de plus simple :
TAs = 57,3* (diamètre de votre Soleil / Pdist (en km)).
Le diamètre du Soleil, je le trouve en consultant le tableau dans mon article sur la création d’étoiles, où les étoiles de type M2 apparaissent.
TAs = 57,3* ((0,53*1392684) / (0,203*149000000))
TAs = 57,3* (738122,52/30247000)
TAs = 57,3 * 0,0244
TAs = 1,398
Je rappelle que la taille apparente du Soleil sur Terre, c’est 0,5°. Ici, nous aurions une taille apparente de 1,398°.

Pour aller plus loin
Atomic Rockets
wwww.masonchane.com
Worldbuilding : a writer’s guide to constructing star systems and life-supporting planets, Stephen L. Gillet, Writer’s Digest Books
Je découvre cette série sur le wolrdbuilding. C’est passionnant, je ne m’étais jamais posé la question de comment cela pouvait se créer. Je vais donc parcourir tes différents articles par curiosité.
Je n’ai pas vraiment (du tout) l’âme d’un écrivain par contre inventer un univers doit être sympa.
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Merci beaucoup pour ton commentaire.
Je viens à peine de commencer ma série d’articles, j’espère boucler la partie cosmologie rapidement ! En tout cas, je suis content si ça t’intéresses.
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